Muse de Lumière.
Dans les
nuits de claire lune où brille la voie lactée dans un éclaté d’étoiles, une
lumière, telle une luciole, attire le regard vers le sommet d’une montagne “la
Tête du Houx“. Dans l'avancée de la nuit elle s’amplifie successivement de
plusieurs faisceaux lumineux éclairant le ciel puis aux premières lueurs de
l’aurore s'éteint jusqu’aux prochains soirs de lune.
Le monde des humains
grouille, consomme à outrance. La nature s’essouffle comme gonfle la pauvreté.
Les gouvernants et les très riches se concertent mais ne trouvent pas d’accord.
Les profits des excès génèrent de l’argent et alimentent des conflits. Le
bellicisme s’oppose à la bienveillance. Dans cet attentisme austère, une chape
de pollution, brume noirâtre recouvre tous les continents, tous les océans et
occulte inexorablement le soleil, la lune, les étoiles.
La terre n’est
plus qu’une masse cotonnée d’un manteau mouvant. Les gouvernants s’engluent non
plus de la terre mais depuis le ciel à bord de paquebots volants. Dans l’ombre
de la terre au soleil à la brillance de la lune, ils aperçurent, transperçant
le nuage de pollution, un rai de lumière. Branle bas dans tous les bureaux
volants, localisation de cette lumière intermittente, ils mandatent chacun son
émissaire pour une course à qui capturera et exploitera ce phénomène à son
escient.
Dans la grisaille du petit matin tous phares allumés des centaines de
véhicules convergent et stationnent au bas de la montagne “la Tête du Houx“ ou
nul chemins ne mènent au sommet. Quel ne fut pas l’étonnement de tous les
sbires lorsqu’émergea d’une haute haie de fougères, une petite fille, Lara,
portant une mallette de peintures et des toiles attachées à un chevalet.
« La lumière! Ou
est la lumière ?» scandent les sbires impatients. A peine étonnée, Lara, avec
un mignon sourire, promit le secret de la lumière à tous les gouvernants qui se
déplaceront personnellement à la ferme de son grand père. Il n’en fallut pas
moins d’un jour pour que des centaines de voitures officielles à la queue
leu-leu rejoignent la ferme.
Reçus séparément par Lara et son
grand-père, les gouvernants ressortaient une toile emballée sous le bras avec
la consigne d’attiser son pouvoir purificateur de l’atmosphère en lui rendant
compte des actions qu’ils mèneraient pour rééquilibrer la terre tout en
respectant toutes les espèces vivantes. Certains enthousiasmés, d’autres
circonspects, au bout de deux similis jours et nuits certaines, le calme était
revenu aux abords de “la Tête du Houx“ et de la ferme du grand-père de Lara.
Quelques années passent et comme par enchantement, la grisaille opaque se
dissipe. Le soleil, la lune, les étoiles brillent à nouveau sur toutes les
contrées du monde. Les gouvernants ont tenu leur parole. Plus d'élevages ou de
cultures intensives, plus d’exploitation de la nature non renouvelable. Les
très riches équilibrent leurs fortunes en investissant tous les bénéfices dans
l’innovation et améliorent les conditions de tous les peuples.
Les toiles dans
le monde entier rayonnent de plus belle. Les pays organisent même une coupe du
monde annuelle récompensant celui qui a, au reflet de la Lune, le rai de
lumière le plus lointain. Depuis le point le plus élevé du pays organisateur
dans une nuit de Lune après un parcourt sélectif genre étoiles d’orientation,
le pays dont le rai de lumière atteint l’objectif situé au plus loin dans les
confins de l’univers gagne les lauriers d’or du World’neat. Les performances
s’améliorent à chaque jour et certains pays prétendent même toucher un jour le
firmament.
J’atteins
le sommet de “ la roche du Houx“ un soir de lune et me retrouve devant un joli
tableau. Lara debout face à une toile blanche posée sur un chevalet, son pouce
inséré dans une palette de peintre garnit des couleurs de l’arc en ciel et en
fond, la majestueuse silhouette d’un Houx centenaire. Elle me voit, m'invite à m’assoir
sur une pierre et me susurre “ les petites âmes des arbres tombés vont bientôt
se réveiller“. Je n’attends pas longtemps. Le feuillage du Houx s’ébroue
laissant des dizaines de lucioles s’évader des feuilles qui se mettent à danser
autour du chevalet. Dans leur frénésie elles caressent les couleurs de la
palette et par petites touches, elles peignent la toile. Lorsque la toile s’est
entièrement coloré, Lara l’oriente vers la lune. Un rai de lumière réunie
l’astre et la toile puis aspire toutes les lucioles qui finissent dans le ciel
noir en une apothéose d’étoiles filantes. Les petites âmes sont au ciel. Lara
pose la toile sur laquelle j’aperçois une sphère d’or cernée d’étoiles sur un
fond aux nuances de la terre.
Lara remet une nouvelle toile et attend. Le jour
se pointe, elle se lève avec un grand sourire et vient vers moi !
“Je suis
heureuse, me dit elle, je descends souvent sans toile peinte. Cela signifie que
les hommes sont respectueux envers les arbres et les préparent avant de les
couper. Le Houx accueille plus souvent les âmes des arbres qui ont vieilli ou
sont tombés par un grand coup de vent“
Sur le chemin de
retour vers la ferme Lara me conte que son grand-père un jour en contemplant le
bel horizon depuis “La Roche du Houx“ il avait entendu une voix venant du Houx.
Cette voix lui avait demandé d’invoquer les petites âmes errantes des arbres à
se regrouper dans son feuillage. Il accepta avec bonheur et me donna la joie
d’être leur petite muse.
Un filet de larmes coule
sur chacune de ses joues. Je la prend dans mes bras et lui demande quel est ce
gros chagrin. Dans un gros sanglot elle me dit “ il y a deux mois grand-père
est parti. Il a eu un bel enterrement “ le temps de reprendre une bouffée d’air
elle continue “ Au claire de Lune dernier, lorsque les lucioles batifolaient
sur la toile, un souffle doux vint me caresser la joue puis sur mon épaule
gauche j’ai senti une présence bienfaisante. Elle s’en est allée avec les âmes
des arbres lorsque la lumière a réuni la lune et la toile. Je n’ai pas pu
l’accompagner du regard, mes yeux étaient tellement embués. Lorsque j’ai
retourné la toile il y avait non plus une boule mais un cœur d’or“ “ ton
grand-père, lui dis-je, à beaucoup de chance là ou il est “ Elle me sert
de ses petits bras, sa tête sur mon cœur. Des vagues de bonheurs nous
traversent. Nous recevons la reconnaissance des arbres qui nous entourent.
Arrivée aux abords de la ferme Je
l’embrasse sur le front, un petit sourire illumine à nouveau son visage. Elle
me tend la toile et me l’offre.
Je suis revenu
près de la ferme. J’ai appris que Lara habite la grande ville et que la ferme
est devenu un lieu de vacances. Le cœur battant je monte à “ La Tête du Houx “
Le Houx est toujours aussi majestueux. En me rapprochant de lui je vois
accroché sur une haute branche une palette de peintre et posé sur une autre,
une toile vieillie par le temps. Près de son pied un chevalet un peu
désarticulé ressemble à un chef d’orchestre. Je regarde l’horizon, que notre
terre est belle. Elle baigne dans la bienveillance celle qui nous guide à
comprendre et à aimer toutes les vies pour preuve, les arbres nous ont pardonné
et ils nous considèrent comme des amis.
Bienheureux ceux qui, les pieds
ancrés au sol comme des racines et les paumes des mains vers le ciel comme la
couronne, les imitent et consciemment vivent dans l’équilibre des belles et
bonnes énergies.
Victor Hugo pourrait écrire “C’est
bonne chose de songer que la nature parle et que le genre humain l’écoute avec
son cœur“
En
cette veille du beau jour de Noël gardons l’espoir de ces jours meilleurs et
dans l’instant présent accueillons dans nos cœurs comme des présents
inestimables tous les beaux messages d’amours et de paix qu’ils soient de la
terre ou du ciel. . à Joao.
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